top of page
Photo du rédacteurCécile Reix

Parents, pourquoi lâcher prise sans culpabiliser ?



Aujourd'hui devenir parent est souvent un choix mûri. L'enfant est parfois longuement attendu et très investi. Avec le développement des sciences psychologiques, les conduites éducatives ont été passées à la loupe avec pour questionnement:


Comment faire de nos enfants des adultes compétents, performants, mais aussi heureux dans leur vie future ?


La pédagogie positive, résultant de cette réflexion se trouve aujourd'hui vulgarisée dans de nombreux ouvrages donnant des recommandations sur la manière d'éduquer les enfants et les erreurs à ne pas commettre.


Par ailleurs, en lien avec la montée des valeurs individualistes qui gouvernent aujourd'hui nos modes de vie occidentaux, nous sommes encouragés à l’introspection et à suivre nos aspirations.


Aussi, les parents d'aujourd'hui, eux-mêmes élevés dans cette société, subissent parfois une sorte de pression interne résultant d'un conflit entre deux types de valeurs: celles ancrées dans l'individualisme, écouter ses propres besoins, mais  aussi faire preuve de beaucoup d'abnégation, car ceux des enfants passent au premier plan.


Ces injonctions contradictoires sont parfois à l'origine de culpabilité, de frustration voire de regrets amenant les parents à consulter non pas pour leur enfant, mais parce qu'ils ont peur de mal faire. Les situations de stress en lien avec la parentalité, vécues dans la durée et quotidiennement sans ressources pour y faire face peuvent conduire au burnout parental. Dès lors, la parentalité n'est plus qu'une contrainte conduisant à l'épuisement psychique et physique. Les parents se distancient émotionnellement de leurs enfants. Ils font juste ce qui est indispensable, les nourrir, les conduire à l'école, mais pas plus. Ils ne passent plus de temps de qualité avec eux. Un contraste entre ce qu'ils voulaient être et ce qu'ils sont aujourd'hui témoigne d'une cassure dont l'entourage se rend également compte.




Moïra Mikolajczak Professeure de psychologie clinique et Directrice de Recherche à l'Université de Louvain en Belgique, spécialiste dans le domaine des compétences émotionnelles.


Isabelle Roskam Professeure de psychologie du développement et Directrice de Recherche à l'Université de Louvain en Belgique, spécialiste internationalement reconnue dans le domaine de la parentalité et du développement de l’enfant.




Sans aller dans les extrêmes du burnout parental, d'autres conduites peuvent mettre à mal la relation parents-enfants.


"Un parent qui met sous pression de la même manière les résultats scolaires, l'usage des écrans, la discipline alimentaire, les façons de s'habiller, de parler, de bouger, de se distraire, de se cultiver, de dormir, de se lever, de rêvasser, de se balader de ne rien faire ou de choisir des copains aura vite fait non seulement de "gonfler" son enfant, mais aussi (et surtout) de craquer lui-même sous la double contrainte de l'étendue de la mission qu'il se donne et de la force qu'il s'oblige à exercer pour satisfaire ses exigences dans les multiples domaines visés"

Bruno Humbeeck, 2022, "Comment lâcher prise sans laisser faire avec son enfant"


L'auteur distingue plusieurs types de conduites parentales découlant de ces exigences, rassemblées sous le terme "hyperparentalité".


Le parent hélicoptère:

C'est celui qui veut tout contrôler. Derrière ces conduites, l'angoisse domine: "dès que je ne te vois pas tu es en danger..." Dès lors, comment laisser de la liberté à ses enfants sans craindre pour eux? Pour se soustraire à ce contrôle et cette omniprésence, l'enfant s'oriente parfois vers des activités que le parent ne peut pas investir, typiquement aujourd'hui les jeux vidéos.


Le parent drone:

C'est le parent hélicoptère "upgradé". Il veut le meilleur pour son enfant, dans tous les domaines. On le retrouve souvent parmi les adeptes de la pédagogie positive vulgarisée.

Bruno Humbeeck remarque dans ces conduites éducatives la surreprésentation de la joie, du contentement constant et de la satisfaction immédiate. A l'image du joueur de curling qui balaie la glace devant le palet pour qu'il glisse le plus loin possible, pour le parent, il s'agit d'éviter à ses enfants des expériences négatives. Mais comment leur apprendre ainsi à vivre dans notre réel et son lot de frustrations ?


Pour autant, en aucun cas il ne s'agit de faire de reproches aux parents qui se sentent "hyper" responsables de leurs enfants. Il est juste nécessaire d'être en mesure d'aménager cette parentalité lorsqu'elle devient source de souffrances et qu'elle met à mal la relation entre parents et enfants. D’autant plus que le lâcher prise appliqué à la parentalité, autre injonction contradictoire de notre société actuelle, ne se réduit pas non plus à un non interventionnisme éducatif.


L’auteur appel surtout à renoncer au souci de perfection selon la perspective prônée par Winnicott avec le concept de la "mère suffisamment bonne", à savoir:


Être un parent suffisamment défaillant et comprendre l'importance de ne pas combler son enfant.


Psychopédagogue, Docteur en sciences de l’éducation,

Directeur de recherche au sein du service des Sciences de la famille de l’Université de Mons.

Des références:

"Hyper-parentalité: Apprendre à lâcher prise pour le bien des parents et des enfants" , à paraître le 27 octobre 2022

57 vues0 commentaire

Comments


bottom of page